L’enfant oublié du Tibet

L’enfant oublié du Tibet

Gilles Van Grasdorff

Presses de la Renaissance

Il y a fort longtemps que je n’ai eu le désir de partager la découverte d’un livre, je me contentais d’en parler, de le prêter.

Là, impossible de se taire.

Cet ouvrage est un témoignage saisissant, effrayant.

Je suis allée jusqu’au bout car si des hommes ont pu subir, survivre à de telles ignominies sans être broyés, je ne pouvais qu’en prendre connaissance pour à mon tour témoigner.

Depuis Mao Tsé-Toung la machine communiste est en action au Tibet. Elle a broyé un peuple, saccagé l’économie, la culture ancestrale, dévoyé la religion. Ce qui en reste ressemble à une vitrine pour touristes inconscients de ce qui s’est joué, se joue encore.

Au cours de ma lecture j’ai eu le sentiment de tomber dans un gouffre sans fond, tout en étant comme anesthésiée pour pouvoir continuer la lecture.

Je croyais avoir fait grosso modo le tour des horreurs en matière de génocide, je me trompais….

Tuer à petit feu, massacrer un peu chaque jour en gardant juste un souffle de vie pour éventuellement le ranimer pour mieux exterminer.

Des femmes avortées de force quasiment le terme atteint, leurs nouveaux-nés dévorés.

Des « dispensaires » dans les camps de travail (laogai) spécialisés dans les prélèvements d’organes revendus à des « clients » japonais, américains et ressortissants des Émirats du Golfe, certains de ces « invités » (c’est le terme employé par les dirigeants des laogais) ayant même la possibilité de choisir leur donneur parmi les prisonniers.

Des atrocités à n’en plus finir !

Le fin du fin est que le but recherché, outre de détruire, consistait à amener des tibétains, par la peur, le mensonge à être les propres bourreaux de leurs concitoyens.

Le Parti communiste chinois a pratiqué (pratique?) le lavage de cerveau à grande échelle. Dans les camps d’extermination nazis tout tendait à détruire l’homme physiquement même si par voie de conséquence le psychisme était atteint.

Le PC chinois manifestait la volonté de remodeler la pensée, de la détruire, c’est à dire de détruire l’essence même de l’Homme.

Une des questions que pose de récit est de savoir si le 11^e Panchen-Lama, Guendün Chökyi Nyima, enlevé au Tibet à l’âge de 6 ans et condamné à la réclusion par ses kidnappeurs à Pékin, peut avoir réussi, comme son prédécesseur (même si au final il y a laissé la vie) à conserver son intégrité morale, psychique, spirituelle, physique.

Alors qu’il avait été désigné en 1995 par le Dalaï-lama en résidence à Dharamsala depuis l’invasion du Tibet (selon un protocole qui se perd dans la nuit des temps et fondé sur des rites sacrés) pour être le 11^e Panchen-lama, c’est un autre enfant, dont la famille était fidèle à l’idéologie communiste, qui lui fut préféré.

Le Panchen-lama est le guide spirituel des bouddhistes tibétains, c’est à lui que revient la charge de rechercher et nommer le successeur du Dalaï-lama (guide spirituel et temporel).

L’enfant enlevé portait sur lui, entre autres signes, les marques des tortures infligées à son prédécesseur dans les geôles chinoises. Son village fut mis à sac le jour de son enlèvement, enlèvement dont il avait été informé en rêve ! Ses parents furent torturés alors qu’il implorait les soldats de les épargner.

Que reste t’il d’authentique du Tibet aujourd’hui ?

Que se passera t’il lorsque la succession du Dalaï-lama se posera ?

Le 11^e Panchen-lama actuellement nommé par les chinois et qui a été élevé hors de l’esprit du bouddhisme tibétain, n’est pas celui que les Tibétains reconnaissent comme guide spirituel.

Est-ce à dire que cette religion est en passe d’être dévoyée et de disparaître ?

Autant de question que soulève ce livre et qui montre clairement que l’âme, son épanouissement, sa survie sont devenus des enjeux politiques !

Malraux disait le XXIe siècle sera spirituel ou ne sera pas !

Ce livre fait écho à cette pensée à l’évidence prémonitoire.

Et elle ne se pose pas que pour le Tibet !

Dominique