Il n’est pas vraiment facile de trouver le camping central de Graz, surtout lorsque le point stratégique d’accès est envahi de travaux. Pourtant, au début, nous avions tout bon et puis soudain, sans trop savoir pourquoi, tout s’est gâté, nous nous sommes retrouvées à la gare… Là, y’avait un « blème » !
Fort heureusement pour nous, comme nous l’avions déjà constaté à Vienne, les autrichiens ont toujours à cœur de venir en aide au touriste égaré. Parlant le plus lentement possible pour s’adapter au mieux à mes connaissances d’allemand, ne ménageant pas leur peine et à grand renforts de gestes éloquents, trois autochtones nous ont successivement aidées à mettre un terme à notre errance.
Le camping central de Graz est un modèle du genre. Parfaitement conçu pour l’accueil des camping-cars et des caravanes : rapidité, efficacité, fonctionnalité ; du cinq étoiles, pour le moins ! Les emplacements sont vastes et bien délimités. Les sanitaires, dont l’accès est sécurisé, sont irréprochables, comme partout ailleurs en Autriche. Je suggère aux propriétaires et gérants de camping français d’aller faire un tour à l’étranger pour prendre quelques leçons. En Autriche, comme en Allemagne où en Espagne, il y a du papier dans les toilettes, les douches, généralement pourvues de flexibles, ne crachent pas tous azimuts, l’eau est à la température voulue et il n’y a rien à redire quant à la propreté. Nous qui fréquentons beaucoup les campings, nous pouvons dire que tous ces critères sont rarement réunis en France dans un même camping.
Le terrain de camping de Graz a un atout supplémentaire : il est mitoyen d’un superbe espace aquatique, gratuit pour les campeurs. Un véritable lac bordé de pelouses ombragées, agrémenté d’un resto-buvette. Chacun peut y débarquer avec toute sa panoplie : nattes, transat, parasol, pour y passer une heure ou la journée entière. Le bassin est immense… C’est extraordinaire !
Autant dire que sitôt installées, la visite de Graz, pour nous, a commencé par là ! Et elle commençait bien.
Ce n’est que le lendemain que nous avons visité la ville, utilisant comme prévu les moyens de transports locaux, le bus n°32, qui passe à proximité du camping. Un imprévu toutefois : ce jeudi 15 juin est un jour férié, car ici, en Autriche, pays ultra catholique, on célèbre la Fête Dieu, ou Fête du Saint Sacrement, soixante jours après Pâques, pour commémorer la présence réelle de Jésus Christ dans le sacrement de l’Eucharistie. (Merci, Wikipédia !).
La conséquence, heureuse ou malheureuse, c’est que tous les magasins sont fermés. La Herrengasse, la grande avenue principale de Graz qui permet d’accéder au centre ancien depuis la Jakominiplatz où le bus nous a déposées, est coupée à la circulation et seuls les piétons et les cyclistes peuvent l’emprunter.
Cette découverte de Graz plutôt bucolique n’est pas pour nous déplaire. Une chose est sûre, nous ne visiterons pas la Stadtpfarrekirche ; outre le fait que son clocher disparaît sous les échafaudages, elle est au cœur des festivités du jour : la foule endimanchée et quelques ecclésiastiques y convergent.
Ce n’est pas grave, les centres d’intérêts ne manquent pas à Graz. Seconde ville d’Autriche après Vienne, la capitale de la Styrie possède de nombreux atouts pour attirer le visiteur. De splendides maisons peintes à découvrir un peu partout, notamment sur la Herrengasse, mais pas seulement… Le Landhaushof, siège de la diète et du gouvernement de la province, dont la cour intérieure, ornée d’arcades sur deux étages est considérée comme un chef d’œuvre de l’architecture italienne… Un dédale de petites rues et places où il fait bon se perdre et flâner le nez en l’air pour traquer les moindres détails architecturaux…
La Hauptplatz (place principale) et le Rathaus (hôtel de ville) rebâtie au XIXème siècle, bâtiment imposant flanqué de deux tours d’angle ornées de coupoles.
Au pied du Rathaus, une estrade est installée et déjà la fanfare égrène quelques airs. Ignorant en quoi consistent les festivités de la Fête Dieu, nous avons passé un bon moment à attendre sous un soleil de plomb au milieu des autochtones, assises au pied de l’imposante fontaine qui orne la place, érigée en 1878 à la mémoire du prince de Styrie, l’archiduc Jean. Nous avons assisté à l’arrivée de la procession, curieux mélange de religion et de militarisme, puis lorsque nous avons compris qu’ils allaient dire la messe (comme dit notre cousin Gérard, nous sommes des mécréantes !), nous nous sommes éclipsées rapidement pour aller admirer, non loin de la Herrengasse, le Glockenspiel, un magnifique carillon qui laisse apparaître trois fois par jour, à 11h, 15h et 18h, un couple de figurines en bois en costume traditionnel styrien. Les deux personnages exécutent quelques voltes au son du carillon, pour le plus grand plaisir des petits et des grands avant de disparaître derrière les volets jusqu’à la prochaine prestation.
La visite de la ville se fait aisément à pieds. L’histoire et la modernité se juxtapose. Ainsi, franchissant le pont sur la rivière Mur qui traverse la cité, on peut découvrir sur l’autre rive un bâtiment étonnant, jouxtant les majestueux clochers baroques de la Mariahilfekirche, le kunstGraz, musée d’art contemporain. Réalisé en 2003 (Graz a été élue capitale de la culture cette année-là) par deux architectes londoniens, c’est une étonnante masse sombre vernissée, qui ressemble à un gros concombre de mer hérissé de petites ventouses. Bizarre, bizarre… Anglais.
Mais ce n’est pas tout. Une autre réalisation interpelle tout autant, sinon d’avantage (j’avoue que je préfère), à savoir, Murinsel, une île artificielle tout en verre, posée au ras des flots de la Mur, reliée par des passerelles à chacune de ses rives. On y trouve un café avec de sympathiques terrasses et un amphithéâtre.
Mais l’emblême de Graz est sans doute le Schlossberg. Construit il y a plus de 1000 ans sur cette colline boisée qui domaine la ville, c’est un petit château, (« gradec », en langue slave), aujourd’hui disparu, qui lui a donné son nom. Une imposante forteresse, construite en 1544, lui succéda, figurant dans le Guinness des records comme la plus solide forteresse de tous les temps. Elle fut pourtant détruite par Napoléon en 1809 et il fallut que les Grazois versent à l’empereur une importante rançon pour qu’il daigne épargner le beffroi et la tour de l’horloge.
On peut accéder au Schlossberg à pieds, en empruntant les multiples allées qui sillonnent la colline ou par un escalier, ou plus cool, et gratuit avec le ticket journalier permettant d’emprunter à volonté bus et tramway, par un funiculaire vertigineux qui offre une vue imprenable sur les toits de la vieille ville dans son environnement moderne.
On accède ainsi directement à la première terrasse où il est possible de boire et de se restaurer, à proximité des points stratégiques : les casemates qui servent aujourd’hui de coulisses à un théâtre en plein air, la Glockenturm ou beffroi et sa célèbre cloche Liesl, la terrasse supérieure où l’on peut admirer l’ancienne porte gothique et le lion Hacker érigé à la mémoire du dernier défenseur du château de Graz, Franz von Hacker, tout en profitant de généreux ombrages et d’une vue à 360° sur la capitale de Styrie.
Il faut ensuite redescendre à pieds pour découvrir le bastion des écuries, le bastion des canons, le pavillon chinois et la tour de l’horloge, un des clichés les plus célèbres de Graz !
Après s’être restaurées de façon moyennement satisfaisante dans une pizzeria, nous avons poursuivi notre découverte de la ville, admirant de nouvelles maisons peintes,
la façade richement décorée de la Hofbäckerei Edegger-Tax, ou boulangerie impériale (fermée !), l’étonnant escalier hélicoïdal double du Burg (château), siège actuel du gouvernement de Styrie,
sans oublier bien sûr la cathédrale, le Dom, où nous avons longtemps cherché la fresques représentant les trois fléaux qui s’abattirent sur la Styrie en 1840 (la peste, les turcs et les sauterelles), avant de réaliser qu’elle était forcément à l’extérieur de l’édifice ! Le mal doit rester dehors…
Notre journée à Graz aura été bien remplie et il est certainement possible d’y passer plus de temps, en fouillant davantage, en visitant des musées. Une autre fois, peut-être, si nous revenons en Styrie !
C’est fini pour aujourd’hui ; nous avons eu très chaud et nous n’avons plus qu’une idée : retrouver la baignade et aller nous rafraîchir. Evidemment, en ce jour férié, elle est beaucoup plus envahie qu’hier, mais le plan d’eau est si vaste que la foule n’est pas un problème. Il y a même un coin, dissimulé derrière des tentures, pour les adeptes du naturisme ! Ils pensent à tout, ces autrichiens !
Frédérique