Nous voici, une fois encore, de retour d’un séjour découverte. Cette fois nous avions mis le cap sur l’Ariège, ce n’est pas loin et nous ne connaissions pas vraiment. Et bien c’est très dépaysant. Le trajet est pépère sauf sur le tronçon emprunté par le tour de France. Le bitume est tout « grabouillé » et impossible de tout déchiffrer à moins de s’arrêter tous les 30 mètres. Nous avons ensuite rencontré d’autres écrits, mais là, c’était soft et très explicite : OURS NON !
Pas besoin de décodeur.
Nous avons réussi à mettre à notre actif, 2 belles randonnées avec le Pic des trois seigneurs comme toile de fond.
Pour la première il fallait une bonne dose d’imagination pour se faire une idée du paysage, nous sommes restées tout le temps dans les nuages. Nous avions décidé de découvrir les hameaux des Goutets. Ces hameaux étaient destinés à accueillir les bêtes pendant l’estive. Abandonnés un paquet d’années, ils renaissent de leurs cendres et depuis quelques temps, certaines cabanes sont utilisées par un berger.
C’est une architecture typiquement montagnarde, schiste à tous les niveaux.
La nature des toits permet de différencier l’usage de ces cabanes. La lause pour abriter bêtes et gens, le couvert végétal pour aider à la fermentation des laitages.
Si cette balade vous intéresse, voici quelques tuyaux.
Au départ de Massat, il faut suivre le cours de l’Arac jusqu’au village de Le Port. A partir de là, la route file sur Arac et Le Carol et croyez moi, ce n’est pas de la tarte. Déjà avec une voiture, c’est coton, alors avec un fourgon !
Théoriquement, en montagne celui qui monte est prioritaire toutefois il vaut mieux repérer les « passing place » (ainsi nommés en Ecosse) de manière à pouvoir dégager la chaussée, si nécessaire. Avons-nous impressionné par notre gabarit ? Les chauffeurs croisés ont tous été charmants et nous sommes arrivées sans encombre au terminus. S’y garer fut une autre paire de manches, mais en Ariège, la population semble très accommodante !
Atteindre les Hameaux des Goutets, ils sont 3 dans un paysage très andin, est somme toute facile. Il y a juste à suivre l’itinéraire balisé, le 16, au départ du hameau de la Foulie où l’on stationne. Attention cependant à ne pas perdre la trace car par temps de brouillard, c’est risqué.
Nous avons grimpé gaillardement 2 petites heures sans souci, pente est raide sans plus. Par contre arrivées aux premières cabanes, brouillard total, des vaches partout et donc autant de petits chemins que de ruminants. Nous avons erré un bon moment jusqu’à ce qu’un trouée dans les nuages nous permettent de repérer la grange isolée figurant sur le topo guide.
Alléluia !
Nous avons patouillé dans les tourbières, les bouses pour le plus grand plaisir de Virgile et fini par récupérer le balisage aux Hameaux.
Pour le retour un choix multiple s’offrait à nous : la piste dans son intégralité, le sentier de rando balisé jaune ou un cocktail maison alliant piste et sentier. Ce fut notre choix pour raison de sécurité mais apparemment chaque trajet est plein de charme, à vous de voir.
Notre seconde équipée nous a permis de découvrir la cascade d’Ars au départ d’Aulus les bains. Un tuyau, évitez le sentier balisé jaune et préférez lui le GR 10. C’est plus ombragé, évidemment tout dépend de la météo, et très riche en découvertes, enfin, c’est nettement moins fréquenté.
A part cela, reste le compromis : départ matinal par le sentier « touristique », retour par le GR.
La cascade, haute de 246 mètres, se fracasse en 3 chutes distinctes. C’est très pentu, exigu et le raidillon terminal est plutôt adapté aux isards qu’aux humains. Arrivées tôt dans la matinée, nous avons pu jouir de la beauté des lieux en toute tranquillité.
Par contre et jusqu’à ce que nous atteignions le GR 10, nous avons croisé en redescendant une foule digne des Champs Elysées.
La solitude des montagnes !!!
Ce n’est pas possible qu’ils aient pu tous tenir là-bas ou alors « y’a un truc ! ».
Le trajet qu’emprunte le GR est splendide. Au terme d’une rude descente (ou montée, c’est selon) il débouche sur une gorge étroite et profonde, « le Pas d’Enfer », puis se faufile jusqu’à l’arrivée au pont de la Mouline à Aulus entre de superbes murs.
C’est tout un patrimoine architectural que l’on découvre et qui nous permet d’imaginer ce que fut la vie montagnarde. Celle des charbonniers qui exploitaient la forêt, les restes de la construction circulaire d’un four à charbon de bois subsistent.
Celle des paysans éleveurs qui exploitaient un peu partout de petits lopins de terre.
Des ponts rustiques faits d’énormes dalles (on se pose la question quant à la force qui animait ceux qui les ont posées là), sont encore en place.
Les clôtures aux murs cyclopéens s’effondrent, des maisons sont éventrées même si l’on remarque des tentatives de restauration avortées.
C’est tout une vie qui a déserté les lieux rendus à la Nature qui a repris ses droits.
De toute façon, et ce n’est pas moi qui l’invente, depuis 150 ans la forêt pyrénéenne ne cesse de s’étendre alors que la population humaine vivant et travaillant dans les montagnes diminue. Toutes les études le confirment.
Si l’humain, en incluant le touriste, est de moins en moins présent dans la montagne Pyrénéenne, pourquoi donc cette opposition violente à la présence de l’ours ?
L’ours est présent dans le Pyrénées depuis 250 000 ans, autant dire qu’il a eu le temps de s’habituer à son environnement. L’agropastoralisme par contre n’existe que depuis 3000 ans ? Certes, nous ne sommes plus à l’âge des cavernes et au fil des siècles l’homme a empiété sur le territoire des bêtes sauvages, réduisant ces populations à peau de chagrin. Mais si petit à petit et parce que l’homme cède du terrain, certains reviennent, pourquoi ne pas chercher à cohabiter ?
De quel droit faisons-nous la morale aux populations africaines qui ne défendent pas comme elles le devraient, selon nous, l’éléphant ou le rhinocéros, alors que nous ne sommes même pas capables de favoriser la survie de l’ours dans nos montagnes.
Des attaques d’ours contre des humains n’ont jamais été enregistrées mais les agressions de Patous qui protègent les troupeaux sont monnaie courante. Je peux vous assurer que, nous qui randonnons pas mal, avons eu souvent de grosses frayeurs en croisant certains de ces chiens de berger et si nous n’avons encore jamais vu, de nos yeux vu, d’ours, nos routes ont croisé celles de 2 d’entre eux. Une belle crotte toute fraîche au printemps, une superbe empreinte d’antérieur dans la neige, à chaque fois dans le massif du Canigou, ne nous ont pas incité à rebrousser chemin.
L’ours est méfiant et à moins de tomber sur lui par un malencontreux concours de circonstances, nous ne risquons rien de lui.
Jadis, l’ours était chassé par les éleveurs qui en tiraient un certain revenu, les primes d’indemnisation n’existaient pas encore. Aujourd’hui, les dégâts qu’il cause représentent moins de 1% des pertes globales des éleveurs, pertes compensées par de nombreuses mesures. Pourquoi dans ce cas une telle opposition à la présence d’un groupe viable d’ours dans les Pyrénées ?
Il y a une vingtaine d’années, je me souviens que la réintroduction des lynx dans les forêts vosgiennes avait remué les foules, aujourd’hui, ils sont là et cela n’émeut plus personne.
Peut-être en sera-t-il ainsi pour les ours et alors « Lou Moussu* » aura retrouvé droit de cité dans les Pyrénées !
Do
*Le monsieur, autre nom de l’ours avec Martin et Lou Pé Descaous (le va nu pieds)