L’autre visite que nous avons faite et qui m’a ébranlée fut celle du musée ethnographique de Budapest, à Skansen tout près de Szentendre où nous logions. Le principe du musée ethnographique est le même partout.
A Skansen sur un soixantaine d’hectares des fermes et leurs annexes, des bâtiments civils, des habitations ont été réimplantés. Venant de toute la Hongrie ils permettent de se faire une idée très précise de l’habitat traditionnel de ce pays quelle que soit la région.
Le berger de Skansen
De nombreux ateliers sont disséminés dans les différentes constructions en fonction de leur destination initiale : boulangerie, scierie, épicerie, céramiste, fabrique de bougies, ateliers de tissage … une occasion de découvrir les spécialités hongroises autres que culinaires aussi. Nous y avons retrouvé nos moutons à cornes torsadés et découvert des spécimens locaux comme ces canards à « châssis surélevé » ou de gros gros porcs à poils frisés et roux.
Ce musée a cependant un plus sur tout ceux que nous avons visité au fil des ans, l’Histoire avec un grand H s’y invite. Une occasion pour comprendre un peu ce pays qui a souffert de jougs multiples car passé sous dominations étrangères de nombreuses fois durant sa longue histoire. Il faut dire que le Danube est une voie de pénétration de choix et que ce ne sont pas les reliefs montagneux qui ont pu le protéger !
Plaine du Danube
Je ne vais pas vous faire un cours d’histoire même si j’adore mais il est quand même un épisode de la vie hongroise que nous avons découvert à Skansen et qui mérite d’être relaté car il peut éclairer notre façon de juger la Hongrie actuellement. A la fin de la seconde guerre mondiale, la Hongrie qui avait combattu aux côtés de l’Autriche, et pour cause (elle faisait partie de l’empire austro-hongrois depuis un bon bout de temps et contre son gré) s’est retrouvée intégrée au bloc de l’Est.
Les sanctions économiques ne tardèrent pas et à partir de 1948, atteignirent de plein fouet le milieu rural. Le premier acte consista à instaurer pour la possession des terres agricoles des seuils de superficie maximale, seuils au delà desquels les terres étaient expropriées, la vente des terres passant sous contrôle du gouvernement. Petit à petit le seuil s’abaissa et dans le même temps le matériel agricole, les fermes et leurs bâtiments subirent le même sort. Réquisition, pillage des productions et des outils de travail, taxes poussèrent les paysans à abandonner de plus en plus nombreux leurs terres. Entre 1948 et 1955 400 000 d’entre eux quittèrent le monde paysan. Ceux qui restaient avaient à subir les intimidations de la police et des agents de l’ÁVÓ, police secrète hongroise et consœur de la Stasi en Allemande de l’Est.
En 1956 les coopératives commencèrent à voir le jour sous l’impulsion du parti communiste, la collectivisation forcée continuait et en 1961 500 000 villageois avaient déserté leurs terres. Ceux qui restaient subsistaient à grand peine. Quelques cochons ou veaux étaient élevés et abattus en cachette pour assurer la survie !
Clés de maisons "volées"
A partir de 1949 parallèlement les sanctions, comparutions immédiates pour n’importe quel motif puis les déportations des paysans commencèrent. Des milliers de familles furent arrêtées, en pleine nuit le plus souvent. N’ayant le droit d’emporter qu’un maigre bagage dans les camions, ils furent déportées pour plusieurs années avant de pouvoir retrouver pour certains leurs villages d’origine, stigmatisées et humiliées à vie car marqués du terme infamant de « Koulak ».
C’est Staline qui a dévoyé le sens du terme russe Koulak, mot désignant à l’origine péjorativement un fermier. Instigateur de la collectivisation des terres hongroises, il lui adjoignit l’étiquette d’exploiteur et d’ennemi du peuple faisant de ces hommes et femmes des humains méprisables. L’impact fut immense et encore aujourd’hui le monde paysan peine toujours à regagner le terrain perdu ! Une situation parfaitement perceptible lorsque l’on circule en Hongrie !
Sur ce je vous laisse pour cette fois, le troisième coup de coeur nettement plus jouissif sera pour une prochaine fois !
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Nous sommes deux soeurs... L'une peint, l'autre écrit. Nous avons envie de partager nos vécus, nos ressentis, nos expériences; de témoigner... Nous aimons par dessus tout la nature, notre plus grande source d'énergie... Sur ce blog, nous vous présenterons des peintures, des livres, mais aussi des photos de nos voyages, de nos randonnées, des récits... Nous tenterons enfin de vous entraîner dans la grande aventure de notre vie: notre cheminement spirituel vers l'Amour et la Lumière.